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mercredi 18 octobre 2017

L'ART DU GHALAMKAR EN IRAN : COTONNADES PEINTES

LE GHALAMKAR  UN ARTISANAT PERSE



 DECRYPTAGE
 La traduction du mot dévoile le secret que se cache cette technique: dessin  peint  à la  plume. C'est sous la domination des Safavides, au XVIeme siècle que le ghalamkar  atteint son plus haut niveau de qualité. Artistes et artisans développèrent cet artisanat dans la ville d' Isfahan ( parfois Esfahan, parfois Ispahan). Aujourd'hui encore les cotonnades imprimées s'exposent dans les boutiques qui bordent  la place Naghsh -e-Jahan et dans les échoppes du grand bazar.

miniature représentant "l'élément architectural "central de la ville d'Isfahan  : une place  construite au XVIIeme siècle
sous le règne de  Shah Abbas Ier. Elle eut différents noms selon les époques
Naghsh e Jahan = portrait du monde
Meidan-e-Shah = place du roi
Meidan-e-Shah  place de l'Imam

A L'ORIGINE
Le ghalamkar était une toile  peinte à la main   Si les traductions du mot  ghalamkar  sont multiples : peint à la plume, plume et encre, dessin à la plume le sens est toujours le même.  Qu'il s'agisse de pinceaux, d'un kalam( roseau taillé en pointe)  ou d'un bloc de bois sculptés utilisé aujourd'hui, c'est la main de l'homme qui guide l'outil. 
Avant l'utilisation des blocs de bois sculptés ou gravés, il était fait mention de toiles peintes  et non de tissus imprimés. 



kalam : roseau effilé


INDIEN OU IRANIEN?
Cet artisanat a t il vu le jour en Inde ou en Iran, qui influença l'autre, bien difficile de répondre à la question, la circulation des artisans partageant leur savoir -faire et les relations commerciales entre les deux pays furent propices aux échanges culturels.  Les frontières sont   fort arbitraires,  invasions après invasions,  conquêtes après conquêtes, coup d'état après coup d'état, l'histoire  fait bouger les lignes frontalières, mais les populations elles demeurent fidèles à leur culture  sinon à leur religion, et si à un moment de l'histoire le territoire Perse arriva jusqu'en Inde sous Darius 1er au VIe me siècle avant JC pourquoi ne pas imaginer que l'art de peindre sur tissu naquit sur le territoire   Perse  ?


DU GHALAMKAR A LA TOILE DE JOUY
Dès la fin du XVII eme siècle  ces étoffes importées d'Iran et d'Inde  appelées persiennes et indiennes eurent un succès incontestable en Europe. Les tisserands français jugeant la concurrence trop forte, firent interdire leur importation. En conséquences pour répondre à la demande des clients frustrés par cet interdit les étoffes imprimées furent copiées par les européens, et  comme leur commerce était interdits de  nombreux "indienneurs"  tisserands et teinturiers installèrent leur manufactures dans des zones franches comme l'Alsace, et dans des pays accueillants comme la Suisse.  En 1760,  Oberkampf  allemand naturalisé français lui  installera  sa manufacture  de toile imprimées à Jouy en Josas.  
LES DIFFERENTES ETAPES DE LA FABRICATION D'UN TISSU PEINT EN PERSE
Le peintre disposait d'un matériel restreint :  des roseaux ou kalam   mot d'origine perse,  qui signifie travail à la plume qui donna en grec kalamos=roseau. C'est un outil t utilisé en Iran pour le ghalamkar et en  Inde pour fabriquer des kalamkari. Les formes sont variées : certains sont  taillés en biseaux, d'autres avec une pointe écrasée s'utilisaient comme un pinceau. Le kalam  suivant la manière dont il était taillé permettait de tracer des traits  avec des nuances et des dégradés

Premieèe étape 
Le tissu : une percale mot dérivé du persan percala = toile fine serrée. Deux qualités étaient utilisées la percale pour les plus belles réalisations et le calicot, toile de coton moins serrée et moins blanche pour les articles plus ordinaires.  Il semble que  les toiles servant de support pour les ghalamkar étaient probablement des produits d'importation  en provenance des Indes. La valeur ajoutée étant le décor peint et non le support.
La toile  étalée à même le sol  le maître ou ces élèves  délimitent le contour des motifs  avec un charbon de bois ou au fusain  puis à l'aide d'un kalam muni d'un tampon de laine imbibé d'encre noire, (qui sert de réservoir) le peintre   cerne   les contours des dessins  avec un trait noir, en repassant sur les traits provisoires réalisés avec du charbon de bois
La couleur noire était obtenue autrefois en laissant macérer plusieurs semaines des pièces de fer rouillée dans un bain d'eau sucrée, ou additionnée de lait.   

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Les motifs
La peinture  sur tissu contrairement à la teinture reste en surface, ne pénètre pas à l'intérieur des fibres c'est pourquoi elle est fragile et   très peu de Ghalamkar anciens sont encore en circulation. Seuls les ghalamkar utilisés  pour 'illustrer des récits, ou destinés à la décoration d'intérieur sont encore visibles dans les musées éparpillés à travers le monde.
Avec l'invasion arabe au VII eme siècle  les thématiques changent. Les motifs les plus communément représentés  sont inspirés par la flore et la faune,  des palmettes ou bothe ce que nous appelons motif cachemire, des arabesques  
La seconde étape consistait à remplir l'intérieur des dessins à l'aide d'un  kalam dont la pointe a été  écrasée pour la ramollir lui donnant l'aspect d'un pinceau. Les pigments utilisées étaient   d'origine végétale, animale ou minérale  fabriqués à base de graines, de racines, de feuilles,  d'écorces(safran, peau de grenade, brou de noix, (cochenille) Les pigments ne sont qu'un des éléments des matières colorantes, il faut ajouter d'autres substances (graisses ou des huiles)  pour obtenir des couleurs solides et facilement applicables. Le fond clair était toujours visible.
    

 La réalisation des Ghalamkar nécessitait un grand nombre d'heures, et un savoir faire acquis au cours d'un long apprentissage transmis dans les ateliers. Chaque Ghalamkar était différent à quelques détails près,  et bien que chaque artiste ait eu son style, le choix des  motifs et des couleurs était restreint et les innovations n'étaient  pas chose courante. Le but de l'artiste/ artisan était de montrer à quel point il maitrisait la technique et non  de faire preuve d'originalité. 

On peut observer que l'éventail des sujets et leur traitement changeaient en même temps que de nouveaux artistes arrivaient dans les ateliers, c'est ainsi que l'art s'enrichit, par le partage des connaissances et des techniques

Les  conteurs très nombreux en Perse,  utilisaient  les tissus peint pour illustrer leurs histoires  ;  notamment le  grand livre des rois, Shahnama, un  poème épique  écrit par Firdousi vraisemblablement entre le X et le XI eme siècle.  En Inde les kalamkari illustrent souvent   des épisodes du Ramayana ou le Mahabharata. 
Dans la région d'Andhra Pradesh en Inde, la surface des  tissus peints étaient lustrée, conférant une brillance et surtout accentuant la solidité de l'ensemble. C'est ce que les européens appellent chintz, un mot hindi qui signifie "peint"

  épisode de Livre des Rois sur un tissu peint


ARTISTE OU ARTISAN? 
Selon la définition  d'Aristote  au sens grec de téckné, l'art est une  habileté acquise par apprentissage qui repose sur des connaissances empiriques. Jusqu'au XVIIeme siècle, l'artiste n'était pas différencié de l'artisan.
 Aujourd'hui l'artisan est un producteur manuel d'artefacts utilitaires qui fabrique lui-même intégralement la chose, cependant que l'artiste met à profit ses connaissances intellectuelles et  esthétiques  pour créer une œuvre dont la finalité n'est pas d'être utile
L'artiste crée l'artisan reproduit. L'artiste est dans l'abstraction, l'imagination,  l'artisan lui est dans le concret, le quotidien, il  fabrique des choses utiles sinon fonctionnelles avec un minimum d'outils et en petites quantités

UN ART A SON SOMMET
Au XVIe  l'Iran sous la domination des safavides  le ghalamkar  atteint son apogée, sa réputation dépassa largement les frontières de l'Iran. Mais rapidement la demande dépassa les  limites  de production.  Trop long, trop cher, sous cette forme cet artisanat  fut victime de son succès et mourut pour renaître avec plus de vitalité. Cette renaissance lui fut bénéfique  puisqu'aujourd'hui les tissus imprimés sont encore spécificité du commerce  d'Isfahan
Une solution fut adoptée pour remédier à cet embarras : l'impression sur tissu au bloc de bois gravé. Plus rapide, plus économique, cette technique perdure jusqu'à aujourd'hui.


 A SUIVRE












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